Harrison Stafford découvre le reggae à 9 ans, grâce à son grand frère qui lui fait écouter Rastaman Vibration, puis les Wailers, Israël Vibration et Black Uhuru. Il fonde un peu plus tard Groundation en 1998, lorsque il rencontre deux étudiants en jazz de la même université que lui, la Sonoma State University en Caroline du Nord. Le charismatique Harrison Stafford est au chant/guitare/percu, Ryan Newman à la basse et Marcus Urani aux claviers. Ils y apprennent la rigueur, les codes, les modes (mineurs, majeurs…), seul moyen de renverser ou de se jouer de la règle, la connaître sur le bout des doigts, la maîtriser. En 2001, ils enregistrent Each One Teach One, puis Young Tree (2002), pour sortir un monument du reggae moderne, Hebron Gate en 2003 Leur quatrième album, We Free Again (2004) les fait monter sur les scènes du monde entier. En 2005, ils sortent Dub Wars, un 9 titres, puis la 5ème pierre de l’édifice, Upon The Bridge. L’an passé, parallèlement, ils ont enregistré un Tribute to Bob Marley.
:: Chroniques ::
Upon the Bridge
Note : 15.5 / 20
Année : 2006
Groundation est devenu en l’espace de quelques années un groupe incontournable de la scène « reggae roots ». Et ceux qui croient encore que la Californie ne produit que des groupes punk-rock avec le cocktail plage-fille-soleil en intraveineuse vont doucement déchanter. Upon The Bridge, 5ème album, a été enregistré, mixé et masterisé par Jim Fox des Studios Lion & Fox à Washington (Israël Vibration) au Prairie Sun Studios (ceux de Tom Waits, Wu Tang Clan, Mighty Diamonds), un studio qui travaille encore en analogique ! Produit par la tête pensante, chanteur, guitariste, percussionniste du groupe, Harrison Stafford, l’album est tout simplement à couper le souffle. Chacune des musiques est réduit à son essence, ses racines, sa quintessence, et ce n’est pas "The Seesaw" qui clôt l’opus qui va le contredire, progressant lentement vers la folie, jusqu’à l’écroulement du pont, ne laissant plus que la voix et le piano en face à face.
Profondément pacifiste, Harrison Stafford a composé avec ses acolytes entre Santa Clara et Kingston, les 11 pamphlets qui constituent la galette. Les chansons sont plus courtes que d’habitude, avec des structures évolutives relativement atypiques, constituées de variations non répétitives, interprétées par des musiciens dominant leurs instruments, une voix relativement aigüe et enrouée, d’un blanc, rasta. D’origine juive, Harrison explique « Pour moi quand j’écoutais du reggae, les rastas chantaient l’histoire de mon peuple juif ».
"Use to Laugh" voit des featuring de choix colorer les paroles, une intro trombone, puis un peu plus tard IJahman Levi et Pablo Moses aux chants. Idem sur "Mighty Souls". Toujours les paroles seront polysémiques, métaphoriques, un livret (une petite fable mystique), basé sur les concepts de l’album, accompagne d’ailleurs les paroles, en parallèle. Le contenu ne peut pas se résumer. Mais l’idée est, quand même, que la société dans laquelle nous évoluons a mutée. L’auxiliaire avoir a remplacé progressivement l’être. Le Dollar est le nouveau Dieu de nos sociétés. Car il faut savoir que ce 5ème album est une nouvelle pierre à un édifice parfaitement cohérent : Young Tree symbolisait l’éveil de l’individu, Each One Teach One était du domaine de la transmission du savoir et de l’éducation, alors que Hebron Gate représente la porte entre le bien et le mal, le moment où l’on doit faire des choix. Ces choix peuvent être libérateur et We Free Again évoque la délivrance de l’âme, ce dernier opus marque un nouveau pas. L’arrivée sur un pont, qu’il faut traverser sans savoir ce qui est au bout. On note d’ailleurs que l’album débute exactement à l’endroit où We Free Again s’arrêtait, l’écho de la voix de Apple Gabriel. Chacune des pierres de ce cinquième chapitre est un mix de reggae roots, de cuivres jazzy, de guitares syncopées, de prêches rastas. Harrison Stafford annonce en même temps que la sortie de son album, la création d’un autre groupe parallèle, avec le batteur jamaïcain Horsemouth Wallace et le guitariste Will Bernard. Un appendice musical sur lequel il faudra compter à l’évidence. Le monsieur n’a pas pour habitude de faire des banalités.
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